Aller au contenu

Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 1.djvu/368

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

situation. Ayez bon courage, lui dit un prêtre Normand, qui, par bonheur, se trouva parmi les convives,descendez à la cave, & dites au démon de prolonger votre vie de la durée de cette chandelle.

Christofle alla présenter sa requête au démon, qui pour lui donner des preuves qu’il étoit bon diable dans le fond, quoiqu’il supputât les années autrement que dans ce monde, lui accorda sa demande. Le nazaréen rapporta la chandelle au prêtre, qui, sans perdre de tems, la plongea dans l’eau-bénite, pour que le diable ne pût point s’en saisir, & l’éteignit ensuite. Ce trait, auquel Belzébut ne s’attendoit pas, rendit toutes ses ruses inutiles. Il rentra dans l’infernal séjour par un trou profond qu’il forma en retournant aux enfers, & dont on n’a jamais pu sonder la profondeur. Le nazaréen fit une longue pénitence de son crime. La chandelle bénite fut remise entre les mains des moines ; & elle leur a rapporté plus d’argent que Christofle n’en avoit tiré du diable Sapajou.

Examine la crédulité du peuple ; & juge si les excès où son imbécillité le fait tomber, doivent être attribués à sa seule ignorance, ou à la fourberie de tous ceux qui le trompent & l’abusent.

Porte-toi bien, & donne-moi, si tu le peux, quelques nouvelles galantes de Gènes.

De Paris, ce…

Fin du premier Volume.