Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 1.djvu/44

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préférence à l’opéra. Elle en sort pleine de maximes qu’elle y a entendu débiter : le vin, la bonne chere, la liberté du souper, leur donnent une nouvelle force ; elle en est si convaincue, qu’avant de se retirer chez elle, elle les met en usage avec son Amant jusqu’à cinq heures du matin, que le jour, malgré elle, la ramene au logis.

« La dévote, au contraire, fuit cet air bruyant, & cette façon de vivre dérangée ; elle réduit ses passions dans une espece de retenue. Un plumet la scandalise : les manieres vives, étourdies, ne lui conviennent pas : un jeune homme pourroit lui faire perdre la réputation que trois ans de contrainte lui ont acquise : c’est un abbé, obligé à des ménagemens pareils aux siens, qu’elle choisit pour galant. Leur intérêt pour le silence est commun : le moindre éclat perdroit la dame de réputation, & feroit évaporer l’évêché que l’hypocrisie de l’abbé est à la veille de lui procurer.

« Toutes les femmes ne peuvent point avoir des prélats & des chanoines : ce sont là des trésors qui ne sont destinés que pour celles qui sont les plus heureuses ; mais il est