Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 1.djvu/61

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dans ces défauts, pour exprimer plus naturellement leurs pensées : mais leurs livres sont regardés comme des marchandises prohibées & empestées. Les gardes sont attentifs, sur les frontieres du royaume, à n’en point laisser entrer ; & s’il en pénetre plusieurs, c’est par ruse & par finesse.

Cette gêne éternelle empêche les assemblées des gens de lettres de produire des ouvrages parfaits. Il y a plusieurs sociétés à Paris, qui portent le nom d’Académie. La principale & la plus ancienne est l’académie Françoise.

Elle n’a produit jusqu’ici qu’un ramas de complimens. Elle est composée de quarante personnes qui s’assemblent trois fois par semaine. Ces académiciens sont réguliers à se rendre à leurs devoirs, parce que le roi fait distribuer à chacun une médaille d’argent, & que celle des absens est donnée aux présens. Leurs assemblées, depuis près de quatre-vingts ans, se passent en discours de félicitations & de réception, & en louanges qu’ils se prodiguent mutuellement : ils se félicitent de leurs talens & de leur mérite ; après quoi ils retournent chez eux. Ils s’occupent quelquefois à régler un mot ou une syllabe. Alors l’académie entiere travaille, dispute, étudie pendant six mois, & prononce une sentence