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Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 1.djvu/79

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Pendant cette conversation, le prédicateur finit : il termina son discours par les mêmes grimaces qu’il avoit faites au commencement, & disparut par un trou qu’il y avoit dans le pilier.

A peine eut-il cessé de parler, que le chevalier de Maisin me proposa d’aller à la comédie Françoise.

Eh quoi ? lui dis-je, oubliez-vous ce que vient de vous dire ce prédicateur ?

« Il a fait, me dit-il, son métier, comme nous faisons le nôtre. Cet homme est payé pour crier contre les plaisirs. il crie : hé bien, laissons-lui gagner en paix son argent ; mais ne soyons point assez dupes pour nous ennuyer par de vaines craintes. Vous le verrez lui-même ce soir au spectacle. C’est un abbé du grand air. Il y est très assidu : il va changer sa longue soutane en manteau court ; &, en la quittant, se dépouiller de toute sa rigidité. Ces femmes que vous voyez, vont s’y rendre dans le moment. La curiosité d’entendre l’abbé qui a la réputation d’avoir de l’esprit les a amenées ici ; cette même curiosité les conduira à la comédie ; on joue aujourd’hui une piéce nouvelle : je suis bien aise de m’y trouver, l’auteur étant de mes amis. »