Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 2.djvu/230

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quelque précaution contre les poursuites du procureur général. Etes-vous de ces gens, lui dit-il, qui craignent tant la justice ? Je vous casse. Jamais vous ne me servirez : car, tout homme de guerre qui craint une plume, craint une épée. Que penses-tu, mon cher Monceca, que ce duc eût fait à un soldat ou à un officier qui lui eût demandé le tems de prendre conseil de son directeur avant d’entrer en campagne ? Pour moi, je crois qu’il l’eût traité comme un poulet sacré.

Les nazaréens conviennent eux-mêmes que leur conduite & leurs actions sur le chapitre de la guerre, sont entièrement opposées à l’esprit de leur religion. Mais ils rejettent le mal qu’ils peuvent faire sur ceux qui sont à la tête des états, & qui ne doivent jamais engager les peuples que dans des guerres justes. Ce premier principe posé, ils se dépouillent de tous autres scrupules, pillent, volent, tuent, massacrent, brûlent, &c. le tout sans consulter les théologiens, pas même les aumôniers ou chapelains, qui sont dans leurs armées, dont le nombre est presque aussi considérable que celui des vivandiers. Car les moines ont aussi quelque peu de crédit sur l’esprit du soldat nazaréen. Leur adresse est si subtile,