Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 2.djvu/295

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oyaume. »


Les Anglois remercierent Sabataï Sévi dans des termes fort respectueux, & profiterent de la fourbe & de l’imbécillité des juifs pour ravoir leur argent.

Il arriva encore à Sabataï Sévi une scène aussi comique pendant le tems de sa prison ; & qui dans la suite occasionna entièrement sa perte, & démasqua sa mauvaise foi. Un juif nommé Néhémie Cohen, sçavant dans les langues Hébraïque, Syriaque, Caldéenne, & aussi bien instruit dans la cabale des rabbins, que Sabataï lui-même, voulut avoir part à sa gloire. Il demanda à cet imposteur d’avoir une conférence avec lui. Leur conversation fut d’abord très-tranquille ; mais après avoir essayé vainement de prendre des arrangemens qui pussent convenir à tous deux, ils s’échaufferent & s’emporterent avec beaucoup de violence. N’est-il pas vrai, disoit Cohen, qu’il doit, suivant les écritures, y avoir deux Messies ; le premier, pauvre, méprisé, prédicateur de la loi, serviteur du second, & son précurseur ; le second, riche puissant & victorieux ?

Je me contente, continuoit-il, d’être Ben-Ephraïm, ou le pauvre Messie. Quel préjudice cela fait-il à votre gloire ? En serez-vous moins le Messie conquérant ?

Après bien des débats, Sabataï Sévi consentit que Cohen