Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 2.djvu/323

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chez Gradot [1], vous seriez fort heureux de donner vos ouvrages au prix qu’on vous en offriroit.

« Encore, êtes-vous très-heureux, monsieur Vers-Fadet, répliqua l’abbé, d’avoir crédit chez Gradot. Il y a quinze jours que je n’ai plus le même bonheur. Sa femme me présenta un conte de deux mille neuf cent trente-deux tasses de caffé. Ne pouvant les payer, elle n’a plus voulu continuer à m’en donner à crédit. Comment, monsieur, dit le chevalier de Maisin, vous devez deux mille neuf cent trente-deux tasses de caffé ? Oui, répondit l’auteur. Je n’ai rien donné au caffetier depuis neuf ans : & une tasse par jour, c’est-là un compte fort exact, eu égard aux bissextiles. Je comptois lui payer les trois premieres années de l’argent que je tirerois d’un manuscrit. Comme je n’en ai pas reçu la moitié de la somme que j’espérois, je n’ai pû le satisfaire. Mais je crois, monsieur Vers-Fadet, continua l’auteur, que vous devez autant que moi : car nous avons été reçus membres du Parnasse en même tems, & installés

  1. Caffé des prétendus beaux-esprits, à la descente du Pont-neuf.