Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 2.djvu/328

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de tous les connoisseurs.

« Vous avez trop de bonté pour moi, répliqua l’auteur. Je ne mérite point ces louanges. Il est vrai, que peut-être aurois-je pû faire quelque chose de passable, si j’avois employé un peu plus de tems. Mais je me suis taxé à trois feuilles d’impression par jour. Bonnes ou mauvaises, il faut que je les finisse. On ne sçauroit vivre, si l’on fait autrement. Franchement, on travaille comme on est payé. C’est l’affaire des libraires, lorsque le livre est imprimé, de tâcher de le vendre. S’il reste dans leur boutique, c’est tant pis pour eux. Quand j’ai besoin d’argent, & que l’ouvrage presse, j’y fais travailler tout le monde chez moi. Ma femme dicte, mes enfans écrivent, & je revois le tout : après quoi cela va comme il plaît à Dieu.

« Vous êtes heureux, dit l’abbé Grisonet, de pouvoir vous faire aider : mais moi, qui n’ai ni femme ni enfans, je suis obligé de faire tout moi-même. Il est vrai que je ne me donne jamais la peine de revoir deux fois la même chose.

« Je ne vous blâme point, dit l’ami du chevalier de Maisin. Puisque les libraires veulent vous traiter aussi