Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 2.djvu/360

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aux moines, serviteurs zélés du saint office, il est surprenant qu’ils aiment mieux la sévérité des Allemands, qui les tient dans une très-grande contrainte.

S’il est peu de peuples en Italie aussi mauvais que celui de Naples, il en est peu qui soit aussi ignorant & aussi hébété. Il semble ne faire usage de sa raison que pour assaisonner le crime. Dès qu’il ne s’agit pas de faire une mauvaise action, à peine a-t-il quelque notion au-dessus de la bête. Cette ignorance crasse regne parmi les gens d’un rang distingués, & il est surprenant de voir combien ils sont bornés. Leur connoissance ne s’étend qu’au nombre de temples qu’il y a dans Naples. Ils sçavent aussi les jours où l’on doit solemniser la fête de quelque saint, les rues où passent les processions, les caffés où l’on s’assemble : voilà toute leur science. J’entendis l’autre jour dans un de ces caffés, un noble Napolitain, qui fit une demande à un François qui pourra te faire juger de l’étendue des connoissances de ses égaux. Il demanda fort sérieusement, si le port de Paris étoit aussi beau que celui de Naples, & si les vaisseaux du roi s’y tenoient ? Je veux croire que tous les autres nobles ne sont point aussi sots ; mais,