Page:Boyer d’Argens - Thérèse philosophe.djvu/52

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pleins de douceur, d’onction. Il avait l’art de persuader. Né avec beaucoup d’esprit, il l’employait tout entier à acquérir la réputation de convertisseur ; et, en effet, un nombre considérable de femmes et de filles du monde ont embrassé le parti de la pénitence sous sa direction.

On voit que la ressemblance des caractères et des vues de ce Père et de Mlle Éradice suffisait pour les unir. Aussi, dès que le premier parut à Volnot, où sa réputation était déjà parvenue avant lui, Éradice se jeta, pour ainsi dire, dans ses bras. À peine se connurent-ils qu’ils se regardèrent mutuellement comme des sujets propres à augmenter leur gloire réciproque. Éradice était certainement d’abord dans la bonne foi ; mais Dirrag savait à quoi s’en tenir : l’aimable figure de sa nouvelle pénitente l’avait séduit, et il entrevit qu’il séduirait à son tour et tromperait facilement un cœur flexible, tendre, rempli de préjugés, un esprit qui recevait avec la docilité, la persuasion la plus entière, le ridicule des insinuations et des exhortations mystiques. De là il forma son plan, tel que je l’ai peint plus haut. Les premières branches de ce plan lui assuraient bien de l’amusement voluptueux, de la fustigation, et il y avait quelque temps que le bon Père en usait ainsi avec quelques autres de ses pénitentes : c’était, jusqu’alors, à quoi