Page:Boyer d’Argens - Thérèse philosophe.djvu/53

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s’étaient bornés ses plaisirs libidineux avec elles ; mais la fermeté, le contour, la blancheur des fesses d’Éradice avaient tellement échauffé son imagination qu’il résolut de franchir le pas.

Les grands hommes percent à travers les plus grands obstacles : celui-ci imagina donc l’introduction d’un morceau de cordon de saint François, relique qui, par son intromission, devait chasser tout ce qui restait d’impur et de charnel dans sa pénitente, et la conduire à l’extase. C’est alors qu’il imagina les stigmates, imités de ceux de saint François. Il fit venir secrètement à Volnot une de ses anciennes pénitentes qui avait toute sa confiance, et qui remplissait ci-devant, avec connaissance de cause, les fonctions qu’il destinait intérieurement à Éradice. Il trouvait celle-ci trop jeune et trop enthousiasmée de l’envie de faire des miracles pour aventurer de la rendre dépositaire de son secret.

La vieille pénitente arriva et fit bientôt connaissance de dévotion avec Éradice, à qui elle tâcha d’en insinuer une particulière pour saint François, son patron. On composa une eau qui devait opérer des plaies imitées des stigmates ; et le jeudi saint, sous le prétexte de la Cène, la vieille pénitente lava les pieds d’Éradice et y appliqua de cette eau, qui fit son effet.