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Page:Boylesve - Mademoiselle Cloque, 1899.pdf/130

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AUTOUR D’UNE BÉNÉDICTION

— Ah ! quel bonheur !

Ce fut comme l’annonce d’un voyage d’agrément.

— Sont-elles gaies !

— Quelles charmantes fillettes !

— Ah ! que c’est joli, la jeunesse !

— Dieu bénit les nombreuses familles.

— Hélas ! soupira M. Houblon, — avec un à-propos digne d’un homme éloquent, — comme les rois, qu’il bénit et qu’il découronne !…

Il faisait allusion à la perte de sa femme, morte depuis plusieurs années, et qu’il s’obstinait à regretter malgré qu’elle l’eût à demi-ruiné, rendu ridicule et beaucoup ennuyé.

Chacun eut une figure grave et les jeunes filles se turent.

Mais les demoiselles Jouffroy qui avaient absorbé au guichet l’influence du Frère Gédéon, en manifestaient l’insurmontable oppression. Elles se regardaient, à qui parlerait la première. Enfin, Hortense, la cadette, leva tout à coup des yeux de suppliciée sur M. Houblon :

— Ah ! monsieur Houblon, dit-elle, Dieu seul est juge de ce que vous nous avez fait faire… Mais nous craignons, hélas, d’être bientôt les victimes de notre bonne volonté. Cette malheureuse liste…

— Cette malheureuse liste ? s’écria M. Houblon en se redressant de toute sa taille, et déjà prêt, s’il le fallait, à parler sept quarts d’heure de suite, comme la dernière fois.