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Page:Boylesve - Mademoiselle Cloque, 1899.pdf/285

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MADEMOISELLE CLOQUE

— Elle n’aura pas fait plus de bruit à sa sortie qu’à son entrée sous les verrous…

C’était une allusion à la grâce, à elle refusée par Niort-Caen et sans doute accordée à la nouvelle présidente, puisque l’affaire de la protégée de l’Ouvroir avait passé presque inaperçue dans les journaux. Seule Mlle Cloque en portait toute la responsabilité.

Geneviève, amaigrie, les yeux creusés, illuminés d’une sourde flamme, épiait l’occasion qui ramènerait l’entretien sur leur douleur. Elle brossait et secouait les robes avec des mouvements brusques. Dans l’état de mélancolie qui la détachait de beaucoup de choses et tiédissait jusque sa piété, elle gardait un goût vif pour la toilette. Même durant les jours lugubres de l’hiver, où l’on ne sortait que le matin, dans la boue neigeuse, pour aller jusqu’à la chapelle de l’Adoration, jamais elle n’avait négligé de s’habiller. Elle dit à sa tante, gauchement, avec une de ces fausses transitions dont la maladresse trahit l’intention :

— Voilà une robe qui ne fera plus long feu… Tu te rappelles quand je la portais ?…

— Quand tu la portais, mon enfant ?

— Ce n’est déjà pas d’hier ! tu ne te souviens, pas ?… Dame, je l’ai déjà rafistolée pour l’année dernière, et elle n’était même pas toute neuve le jour que je veux dire, tu sais bien… Voyons ! quand nous sommes allées faire visite… il y aura