Aller au contenu

Page:Boylesve - Mademoiselle Cloque, 1899.pdf/30

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
23
LA MAISON DE LA RUE DE LA BOURDE

par être libéral en matière politique ; puis on le devient rapidement en matière de religion et de morale. De là à l’opportunisme, il est clair qu’il n’y a qu’un pas. On disait couramment : les Grenaille admettent ceci, admettent cela. Bon pour ceci ou cela ; mais que n’admettraient-ils pas demain ? On citait ce trait bien significatif de l’aisance avec laquelle cette maison glissait à toute évolution inquiétante : à quelqu’un qui interrogeait M. le comte, à propos des récentes persécutions des jésuites : « Mais, enfin, si vous aviez encore des fils à instruire, les mettriez-vous au Lycée ? » M. le comte de Grenaille-Montcontour avait répondu : « Pourquoi pas ? » Et quelques-uns avaient frémi. C’était une réponse qu’il n’eût pas faite avant l’influence des Niort-Caen.

Les Grenaille observaient une prudente réserve depuis le commencement de l’affaire de la Basilique. Cependant on n’ignorait pas que le comte eût des connaissances tout à fait exceptionnelles en matière d’archéologie. C’était une question qui devait l’intéresser ; il pouvait apporter aux partisans de la reconstruction de l’antique monument l’appui précieux de ses lumières. On n’osait pas l’interroger par crainte de l’entendre émettre un avis défavorable, ce qui eût été le signal de la guerre. Quant à lui, il se taisait. Lors du mouvement suscité par la lacération des plans du projet gouvernemental, la famille de Grenaille était partie pour Vichy.