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Page:Boylesve - Mademoiselle Cloque, 1899.pdf/43

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MADEMOISELLE CLOQUE

chimères d’une partie des cervelles présentes : « Mes frères, il faut être de son temps. Ainsi-soit-il. » Puis il fit son signe de croix et continua la messe.

On se contint jusqu’à la fin ; mais la sortie fut fiévreuse. L’officiant n’avait pas fermé le livre sur le dernier Évangile, que nombre de personnes se hâtaient vers la porte, pressées d’échanger leurs impressions. D’ordinaire, beaucoup descendaient à la crypte déposer un cierge près du tombeau. Seuls, quelques soldats et des femmes pauvres se dirigèrent aujourd’hui du côté de l’escalier. La porte extérieure, sur la rue Descartes, était comparable à l’ouverture d’une ruche d’abeilles.

— Ayez pitié, messieurs, mesdames, ayez pitié d’un pauvre aveugle…

La malheureuse prière de l’aveugle était couverte par la rumeur bourdonnante d’une centaine de femmes qui aussitôt à l’air libre éclataient, laissaient fuser à grands jets leur indignation et leur colère. Elles restaient là, sur place, coude à coude, par groupes confus qui se déformaient ou se pénétraient d’un simple pivotement sur les talons, une phrase commencée au nez de quelqu’un s’achevant brusquement contre une autre figure : propos sans suite, incohérents, mais s’emboîtant les uns les autres à cause d’une aigreur, d’une violence communes ; le ton seul harmonisait ce pot-pourri d’idées dont la plupart,