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COMMENT S’EST FORMÉE LA SYNTAXE.

Il y a une conclusion historique à tirer de ces faits.

Quand on parcourt les listes de « racines » dressées par les grammairiens indous et adoptées, sauf rectification, par la science moderne, on constate que la plupart ont déjà le sens transitif. Ceci prouverait, s’il en était besoin, l’antiquité de la syntaxe. Mais on risquerait souvent de beaucoup s’éloigner de la vérité, si l’on croyait que le sens attribué à ces racines est le sens originaire et initial. Beaucoup, en prenant une valeur transitive, ont dû changer d’acception. Les exemples que nous venons de donner le démontrent surabondamment. Ceux qui croiraient que la racine man a signifié dès l’origine « penser » ou la racine budh « savoir », commettraient la même erreur que si, en un dictionnaire historique latin, on inscrivait « demander, prier » comme premier sens de petere.


Nous passons maintenant à la seconde conséquence, qui a été d’affaiblir la valeur significative des désinences casuelles.

Il est intéressant d’observer comment la force transitive entre peu à peu en lutte avec la valeur originaire des cas, ou — pour parler sans métaphore — comment la force de l’habitude fait qu’à la longue