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COMMENT S’EST FORMÉE LA SYNTAXE.

L’utilité de l’article se sent plus qu’elle ne peut s’expliquer. Pour en être dépourvu, le latin est souvent alourdi dans sa marche. Le grec, au contraire, qui, de bonne heure, en a senti le besoin, lui doit en partie sa souplesse. La conformité du langage français au grec, signalée par Henri Estienne, vient un peu de là. Je rappelle seulement ces tournures : οἱ πάλαι σοφοί… ἐν τῷ μεταξὺ χρόνῳ… τῶν νῦν οἱ τότε διέφερον… Ou celles-ci : ὀρεγόμενοι τοῦ πρῶτος ἕκαστος γίγνεσθαι, etc.

Il est arrivé toutefois que l’article a fini par être introduit là où il n’apportait aucune aide appréciable. On peut dire que les langues où il rend le plus de services sont celles qui restent libres, selon le sens, de l’employer ou de l’omettre. Il est certain que le français, depuis deux siècles, en a étendu l’usage plus que de raison, en sorte qu’il est devenu moins utile à mesure qu’il devenait plus indispensable.


Il faudrait encore mentionner le verbe être, que la scolastique du moyen âge avait déclaré une simple « copule », montrant par là l’impression que ce verbe, arrivé au terme de son évolution, fait aujourd’hui sur l’esprit. Cependant il a commencé par

    nin ». — « Un article est un mot placé devant un nom pour indiquer si ce nom est employé dans un sens particulier ou général », etc.