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LES IDÉES LATENTES DU LANGAGE.


général des racines et des flexions, il ne s’ensuit pas que nos recherches doivent être bornées à la phonétique et à l’étymologie, et que les autres parties de la grammaire nous restent interdites. La syntaxe commence seulement aujourd’hui à avoir une base solide, depuis que l’histoire des idiomes nous révèle le véritable caractère et la signification primitive de chaque flexion, et nous montre, par les pertes que les diverses langues ont subies, les modifications qu’elles ont dû apporter à l’emploi des formes qui leur restent. Déjà les travaux de syntaxe’comparative se succèdent à des intervalles plus rapprochés, et le moment n’est pas loin où coite partie de la grammaire devra s’ouvrir, comme les autres, aux enseignements de la méthode nouvelle.

D’un autre côté, de remarquables travaux, dont la Grammaire allemande de Grimm est le modèle le plus célèbre, montrent ce que l’étude d’une langue gagne en clarté et en charme, quand son état présent n’est pas artificiellement séparé du passé, et quand sous l’air moderne d’un idiome, notre œil apprend à discerner l’œuvre des générations disparues. Un livre comme celui que je viens de vous citer, loin d’épuiser la matière, ouvre à l’activité philologique une carrière sans bornes. Une fois qu’on cesse de voir dans le langage un assemblage de règles sans cause et d’exceptions sans raison, une fois que les dates s’introduisent dans la grammaire et que les faits se disposent par séries successives, le besoin de précision s’accroît à chaque découverte nouvelle et les recherches