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Page:Braddon - Aurora Floyd, 1872, tome II.djvu/126

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AURORA FLOYD

CHAPITRE XXIX

Mellish trouve sa maison dans la désolation.

Le soleil était bas à l’occident et les cloches du village éloigné avaient sonné sept heures quand John s’éloigna lentement de cette solitaire étendue d’herbe rabougrie, et qu’il se mit à errer du côté de la maison pendant cette paisible soirée.

John était encore très-pâle. Il marchait la tête penchée sur sa poitrine, et sa main tenait le papier froissé entre sa chemise et son gilet ; mais une lueur d’espérance brilla à ses yeux, et les lignes sévères de sa bouche se détendirent en un tendre sourire, un sourire d’amour… et de pardon. Oui, il avait prié pour elle, il lui avait pardonné, et il était calme. Il avait plaidé sa cause cent fois dans le calme solennel d’une soirée d’été, et il l’avait excusée et lui avait pardonné. Pas facilement, le ciel en est témoin ; non sans un combat intime et cruel, dont les tortures jusqu’alors inconnues avaient déchiré son cœur.

Cette révélation du passé était une honte bien amère pour lui, une bien horrible dégradation, une infamie bien irrévocable. Son amour, son idole, son impératrice, sa déesse, c’était à elle qu’il pensait. Mais par quel maléfice de l’enfer avait-elle été amenée à cette alliance dégradante, relatée dans ce misérable morceau de papier ? L’orgueil de cinq siècles sans souillure s’était soulevé, hautain et indomptable, dans la poitrine du gentilhomme, à l’idée de voir cet outrage souiller la femme qu’il aimait. Ô Dieu ! est-ce que la glorification qu’il avait tirée d’elle n’aurait été que la vaine forfanterie d’un fou qui ne savait pas ce dont il parlait ? Il était responsable devant le monde de son passé aussi bien que de son présent. Il avait élevé un autel