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Page:Braddon - Aurora Floyd, 1872, tome II.djvu/235

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AURORA FLOYD

Un soir, il fit une apparition à la station du chemin de fer, et essaya de déchiffrer les tableaux des heures collés contre les murs : mais sans aide il ne put en venir à bout, et fut à la fin obligé de s’adresser à un employé à figure avenante qui était occupé sur la plate-forme.

— Je désirerais prendre le train pour Liverpool, — dit-il, et je ne puis rien trouver ici à cet égard.

L’employé connaissait Hargraves et le regarda avec un ébahissement mêlé d’étonnement.

— Ma parole, Steeve, — dit-il en riant, — qu’est-ce qui vous prend d’aller à Liverpool ? J’ai cru que vous n’aviez jamais été plus loin qu’York dans votre vie.

— Cela se peut que je n’y sois pas allé, répondit Hargraves en faisant la mine, mais ce n’est pas une raison pour que je n’y aille pas. J’ai entendu parler d’une place à Liverpool qui, je crois, me conviendra.

— Pas davantage que celle que vous aviez à Mellish.

— Peut-être, non, — répondit Hargraves, — mais Mellish Park n’est plus une place pour moi à présent et ne l’est plus depuis longtemps.

L’employé rit.

L’histoire du châtiment d’Aurora était assez connue parmi la population de Doncastre, et je suis fâché de le dire, il y avait très-peu de personnes qui n’admirassent un peu plus la maîtresse de Mellish Park en raison de ce petit incident dans son histoire.

Hargraves reçut les indications désirées sur les trains entre Doncastre et Liverpool, et quitta ensuite la station.

Un petit homme à l’air misérable qui avait aussi demandé quelques indications au même employé qui avait parlé à Hargraves et qui avait, par conséquent, entendu le court dialogue ci-dessus relaté, suivit Stephen depuis la station jusqu’à la ville. En vérité, si l’idiot n’avait pas été d’une lenteur de perception extraordinaire, il se serait aperçu que ce jour il arrivait que le même petit homme à l’air misérable se trouvait à tous les endroits où lui, Hargraves, se rendait. Mais l’ancien domestique de Mellish Park ne prit aucun souci de cette coïncidence. Son intelligence