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Page:Braddon - Aurora Floyd, 1872, tome II.djvu/251

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AURORA FLOYD

— Jamais Chivers ne m’a trompé, — pensa-t-il, — et sûrement il ne le fera pas maintenant. Et j’ose dire qu’en ce qui regarde l’affaire, ils sont en sûreté dans quelque autre taverne. Je vais m’en aller et les chercher.

Grimstone, comme je l’ai dit, connaissait tous les endroits fréquentés par Hargraves. Cela ne lui prit donc pas longtemps pour visiter trois ou quatre cabarets où Stephen pouvait se trouver, et découvrir qu’il n’y était pas.

— Il flâne quelque part dans la ville, — pensa-t-il, — avec mon homme sur ses talons. Je veux aller du côté du marché et voir si je ne puis les découvrir par là.

De la rue dans laquelle il marchait, Grimstone tourna dans une allée étroite conduisant à une grande place sur laquelle se tenait le marché.

L’agent, marchait d’une manière indifférente, les mains dans ses poches et un cigare à la bouche. Il avait une parfaite confiance dans Chivers, et la foule qui encombrait la place et son voisinage n’affaiblit en aucune manière son sentiment de sécurité.

— Chivers le suivra là malgré tous les obstacles, — pensa-t-il ; — il aura l’œil sur cet homme comme s’il avait à le surveiller entre Charing Cross et Whitehall quand la Reine se rend à l’ouverture du Parlement. Ce n’est pas un homme à être roulé par la foule sur une place de marché de campagne.

Calme dans ce sentiment de sécurité, Grimstone s’amusa à regarder autour de lui avec un air d’étonnement hautain les manières et les habitudes des indigènes, qui se pressaient sur la place du marché, et faisaient leurs affaires dans cette paisible ville. Il s’arrêta sur la dernière petite marche usée conduisant à la porte des comédiens du théâtre, et lut des fragments de vieilles affiches qui pourrissaient sur le linteau et le dormant de la porte. C’étaient de brillantes annonces de représentations dramatiques qui avaient eu lieu il y avait longtemps ; et au-dessus de ces reliques du passé et des taches de boue et de pluie apparaissait en grosses lettres noires le récit d’un drame plus terrible que tous ceux qu’on avait jamais joués sur ce