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Page:Braddon - Aurora Floyd, 1872, tome II.djvu/37

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AURORA FLOYD

ron du vestibule, mais il ne voyait nulle part trace de la présence du chien. La porte du vestibule était fermée, et les persiennes ombragées par les bouquets de roses et de clématites qui abritaient la chambre de Mellish étaient également closes. L’idiot fit le tour du mur qui entourait la pelouse jusqu’à une autre grille qui ouvrait tout près de la chambre de John. Cet endroit se trouvait si complétement ombragé par un groupe de hêtres, qu’il formait un point d’observation parfaitement sûr. Cette grille avait été laissée entr’ouverte par Mellish lui-même, très-probablement parce que ce gentleman avait l’heureuse habitude de toujours oublier de fermer les portes qu’il ouvrait ; et l’idiot, s’enhardissant du calme qui régnait autour de la maison, s’aventura dans le jardin, et s’avança avec précaution jusqu’aux jalousies fermées, devant les fenêtres de l’appartement de Mellish. On aurait pu comparer sa démarche à celle d’un misérable chien sans race se risquant à portée d’ouïe de la nichée d’un mâtin.

Le mâtin était absent en cette occasion, car une des persiennes était ouverte, et quand Hargraves risqua un prudent coup d’œil dans la chambre, il éprouva une vive satisfaction en la trouvant vide. Le fauteuil de John était reculé à quelque distance de la table, sur laquelle on voyait des boîtes à pistolets et des revolvers se chargeant par la culasse. Ces armes, deux ou trois foulards, un morceau de peau de chamois et un flacon annonçaient que Mellish avait occupé sa matinée à inspecter et à nettoyer les armes à feu qui formaient le principal ornement de son cabinet.

Il avait coutume de commencer cette opération avec de grands préparatifs et de refuser avec mépris toute assistance, de se mettre en moins d’une demi-heure dans un état de transpiration violente, puis d’envoyer finalement un de ses domestiques pour remettre les choses à leur place.

L’idiot jetait un coup d’œil d’envie sur la superbe collection de fusils et de pistolets ; il avait cet amour inné de ces choses qui semble être implanté dans tous les cœurs, quelle que soit la situation ou la profession de l’individu. Il avait une fois amassé de l’argent pour acheter un fusil ; mais