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HISTOIRE D’UN RÉPROUVÉ

coulé. L’homme qui l’avait commis avait dû être bien décidé et posséder des nerfs d’acier, car il avait fallu que le crime s’accomplît en un clin d’œil et que le premier cri de surprise de la victime fût étouffé avant d’arriver jusqu’aux lèvres.

Le principal témoin ce jour-là fut le bedeau, et c’était à la suite de certaines remarques faites par lui que Dunbar avait été arrêté.

Le soir, après l’enquête, le bedeau se transforma en un personnage d’une grande importance. Il fut entouré par des commères, avides d’entendre tout ce qu’il pouvait avoir à dire au sujet du meurtre. Parmi les auditeurs du vieillard se trouvait un constable, gaillard rusé et à tête froide qui était aux aguets pour découvrir une trace quelconque à l’aide de laquelle il pût arriver à pénétrer le secret de la mort de Wilmot. Le bedeau, en racontant les événements de l’après-midi du meurtre, parla d’un fait qu’il avait omis de mentionner en présence du coroner. Il parla de la faiblesse soudaine qui avait assailli Dunbar.

— Pauvre gentleman ! — dit-il, — je ne crois pas avoir jamais vu quelque chose d’aussi prompt. Il marchait le long de l’aile gauche la tête haute et avec une allure cavalière, lorsque tout à coup il a chancelé comme s’il eût été ivre, et il serait tombé s’il ne s’était trouvé à côté d’un banc. Il s’est laissé tomber sur ce banc comme une masse inerte, et quand je l’ai regardé, les gouttes de sueur coulaient de son front comme de grosses perles. Je n’ai jamais de ma vie aperçu pareille figure, elle était pâle comme celle d’un revenant. Mais une minute après, le gentleman se remit et riait ; c’était la chaleur qui était cause de cette faiblesse, a-t-il dit.

— C’est curieux qu’un gentleman, qui est à peine arrivé de l’Inde, se soit plaint de la chaleur par une journée comme celle d’hier, — dit un des assistants.