Page:Braddon - Henry Dunbar, 1869, tome I.djvu/162

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
158
HENRY DUNBAR

— Je l’expliquerai à M. Dunbar lui-même.

— Êtes-vous réellement la fille de Joseph Wilmot ? M. Dunbar semble douter que ce malheureux eût une fille.

— Cela se peut. Peut-être M. Dunbar n’a-t-il été informé qu’aujourd’hui de mon existence. Je n’ai appris qu’hier soir ce qui était arrivé.

Elle s’arrêta un moment ; un sanglot qu’elle n’avait pu réprimer l’étouffait ; mais elle redevint bientôt maîtresse d’elle-même, et continua lentement, mais avec fermeté, en regardant fixement le jeune homme avec ses yeux noirs et perçants.

— Je n’ai su qu’hier soir que le vrai nom de mon père était Wilmot, il avait pris un faux nom… mais hier soir, après avoir été informée… du meurtre… (l’horrible mot semblait l’étouffer, mais elle poursuivit bravement), j’ai fouillé une malle de mon père et j’ai trouvé ceci…

Elle sortit de sa poitrine une lettre adressée à l’île de Norfolk, et la tendit à l’avoué.

— Lisez-la, — dit-elle, — vous verrez ainsi comment Dunbar avait fait tort à mon père.

Lovell déplia la lettre jaunie et déchirée. Elle avait été écrite vingt-cinq ans auparavant par Sampson Wilmot. Margaret montra du doigt un passage à la seconde page de la lettre.

« L’amertume de vos paroles contre Henry Dunbar m’est très-pénible, mon cher Joseph, pourtant je ne puis m’empêcher de reconnaître que votre haine envers le fils de mon patron est toute naturelle. Je sais qu’il a été la cause première de votre ruine, et que sans lui votre sort en ce monde eût pu être bien différent. Essayez de lui pardonner, essayez de l’oublier même si vous ne pouvez lui pardonner. Ne parlez pas de vengeance. La révélation du secret dont vous êtes