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HENRY DUNBAR

sous sa gaieté et ses franches allures dormaient encore au fond de son cœur.

Chaque jour, le jeune homme vint donc s’incliner devant la déesse de sa vie, et il fut heureux, fatalement heureux auprès d’elle. Il oublia tout, excepté le séduisant visage qui lui souriait ; il oublia même les doutes terribles qui l’avaient assiégé à propos du meurtre de Winchester.

Peut-être n’aurait-il pu que difficilement oublier les soupçons qui étaient entrés dans son esprit après la première entrevue entre le banquier et sa fille, s’il avait vu souvent Dunbar. Mais le maître de Maudesley Abbey ne se montra que fort peu. Le riche banquier prit possession des appartements qui avaient été préparés pour lui, et il n’en sortit que pour se promener seul dans les allées ombreuses du parc ou pour monter la magnifique bête qu’il avait choisie parmi les chevaux achetés par Percival Dunbar.

Ce cheval était un animal de toute beauté ; il était le produit d’un pur sang, mais sa charpente était plus forte et plus grande que celle d’une bête de race. Sa robe baie brune brillait comme du satin et ne contenait pas un seul poil blanc. Il avait le nez petit, les yeux grands, les oreilles et le cou longs. Il réunissait en lui toutes les qualités que l’Arabe prise si fort dans son coursier favori.

Dunbar devint singulièrement attaché à cet animal. Il fit construire exprès pour lui une grande stalle dans un jardin particulier touchant à son cabinet de toilette, qui, ainsi que le reste de ses appartements, était situé au rez-de-chaussée. Au-dessus de cette stalle se trouvait la chambre du groom de Dunbar, de sorte que homme et cheval étaient sous la main du banquier à toute heure du jour et de la nuit.

Dunbar montait à cheval généralement le matin de bonne heure ou vers le crépuscule après son dîner.