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HISTOIRE D’UN RÉPROUVÉ

de mon amour, avec toute liberté de faire ma cour. Mais si j’allais échouer ! Si Laura, ne m’aimait pas, si elle n’était qu’une magnifique coquette qui se complaît à rendre fous d’amour ceux qui l’approchent ! Mais je veux chasser cette pensée ; je ne veux pas me décourager à l’avance ; je ne veux pas croire qu’elle soit autre chose que ce qu’elle paraît, un ange de pureté et de loyauté.

Mais en dépit de cette loyauté, le courage du baronnet avait presque disparu quand il pénétra dans le salon bleu, où il trouva Mlle Dunbar assise dans l’embrasure profonde d’une fenêtre, un rayon de soleil dans les cheveux et sur les plis soyeux de sa robe. Elle venait de dessiner, mais les menus instruments restaient oisifs sur une petite table à côté d’elle, et une de ses mains pendait nonchalamment, tenant faiblement un crayon entre ses doigts mignons. Elle regardait fixement devant elle sur la pelouse éclairée par le soleil et il y avait dans l’attitude de sa tête quelque chose de rêveur et de pensif.

Elle tressaillit au bruit des pas du baronnet ; le crayon glissa de ses doigts ; elle se leva et se retourna vers le visiteur. Son beau visage était dans l’ombre, mais cette ombre ne cacha pas la rougeur soudaine, l’éclat de bonheur qui l’illumina tout entier lorsqu’elle reconnut sir Philip.

Pour l’amoureux, ce regard était plus précieux que Jocelyn’s Rock et une noblesse qui datait des premiers Stuarts d’Angleterre ; à ce regard inestimable succédèrent des rougeurs pudiques, fraîches et radieuses comme la corolle humide de rosée d’une pivoine cueillie au lever du soleil.

Ce sourire suffisait. Philip n’était pas un fat, mais il vit immédiatement qu’il était aimé, et que de longs discours seraient inutiles. Ils causèrent longuement néanmoins, et je ne pense pas que ce soleil d’automne