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HISTOIRE D’UN RÉPROUVÉ

monde n’a pas la chance d’être millionnaire comme Henry Dunbar, mais il me faut une bouteille de bordeaux à mon dîner, un bon vêtement sur le dos et un billet de banque de cinq livres toujours à ma disposition. Vous ferez bien cela pour moi, n’est-ce pas, cher ami ?

— Je ne m’y refuse pas, — dit Dunbar avec impatience ; — je crois que ce que vous avez dans votre poche est déjà joli pour commencer.

— Mon cher ami, c’est extraordinairement joli, — s’écria le Major Vernon, — c’est un commencement princier. Mais ces deux mille livres, ce n’est pas pour me jeter de la poudre aux yeux que vous me les avez données, hein ? Elles ne seront pas à la fois le commencement, le milieu et la fin ? Vous n’avez pas l’intention de lever doucement le pied… eh ?

— Que voulez-vous dire ?

— Vous n’allez pas vous enfuir ? Vous n’allez pas renoncer aux pompes et aux vanités de ce monde pervers, et faire une expédition précipitée à travers la mare aux harengs… eh ? cher ami de mon cœur.

— Pourquoi m’enfuirais-je ? — demanda sèchement Dunbar.

— C’est précisément ce que je me suis dit, cher ami. Pourquoi vous enfuiriez-vous ? Un homme sage ne quitte pas de beaux domaines, de belles maisons, et un demi-million d’argent. Mais quand vous avez brisé ce verre à bordeaux après dîner, il m’a semblé que vous étiez… risquerai-je le mot… légèrement nerveux. Les gens nerveux font toutes sortes de folies. Donnez-moi votre parole que vous ne vous sauverez pas, et je suis satisfait.

— Je vous dis que je n’ai aucune idée de ce genre, — répondit Dunbar avec une impatience de plus en plus grande ; — cela vous suffit-il ?

— Cela me suffit, cher ami. Votre main pour ratifier