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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

pouvait trouver à se loger. Gustave reçut d’un des amis de sa famille une lettre de recommandation pour l’une d’elles, la Pension Magnotte, la grande maison grise entre cour et jardin, autrefois si noblement habitée.

Un imprimeur occupait le rez-de-chaussée et une main peinte sur le mur indiquait :

PENSION MAGNOTTE,
AU PREMIER.
Tirez le cordon,
S. V. P.

Gustave avait vingt et un ans lorsqu’il arriva à Paris.

C’était un grand gaillard vigoureux, aux épaules larges, à la poitrine carrée, avec une figure franche et de petites moustaches brunes ; des yeux bleus doux, ingénus, une physionomie plutôt saxonne que celtique.

Il était un de ces hommes qui se font tout de suite des amis, et il ne tarda pas à se trouver au mieux avec ses camarades ; il chantait avec eux La mère Grégoire, et même quelquefois risquait un cancan à la Chaumière.

Quant aux fruits, vraiment défendus, ils n’avaient aucun attrait pour le jeune provincial.

L’image de deux bonnes et honnêtes femmes le suivait partout, comme celle de deux anges gardiens. Il ne pouvait emmener cette douce image dans de mauvais lieux, cela lui répugnait.

C’était donc un garçon bruyant, tapageur même, mais non vicieux.

« C’est un brave cœur, disait de lui Mme Magnotte, bien qu’il casse mes verres comme un vrai démon. »

Les dames qui demeuraient à la Pension Magnotte