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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

« Cet exorde pourra vous paraître un peu long, mais je me devais à moi-même de vous rappeler que vous n’avez pas affaire à un vulgaire mercenaire.

« Mon premier soin, après avoir mûrement réfléchi à vos suggestions, a été de trouver un moyen convenable de surveiller les mouvements de Haukehurst.

« J’ai été d’avis que la personne la plus à même de jouer le rôle d’espion se trouverait dans cette classe d’individus dont l’existence semble destinée à s’écouler aux coins des rues, exerçant cette industrie, que dans le patois de ces espèces on nomme : faire a des commissions ; vous savez, ces hommes ou ces garçons qui sortent des pavés comme d’une trappe, lorsque l’on monte dans une voiture quelconque ou que l’on en descend ; créatures gênantes, s’il en fut, qui se présentent sans être appelées, ouvrent les portières ou étendent sur la rue boueuse un lambeau de leurs sales vêtements, puis se lamentent ensuite, piteusement, pour obtenir un sou.

« Je ne mis pas en doute qu’un de ces gaillards devait exister parmi les gens qui rôdaient autour de l’Hôtel Royal.

« Je ne me trompais pas.

« En m’informant d’un garçon adroit qui pût être à mes ordres à toute heure de la journée, non un domestique de l’hôtel, mais une personne qui fût entièrement à ma disposition, j’appris que l’homme chargé de nettoyer les chaussures à l’hôtel avait un plus jeune frère très-habile dans l’art de faire les commissions et qui serait heureux de se mettre à mes ordres, à un bon prix.

« Il s’en remettait à ma générosité.

« Je sais qu’il n’y a pas d’animaux plus exigeants que