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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

Elle se rappelait les outrageantes déclarations qui lui avaient été faites par des étrangers et surtout par des Français qu’elle avait rencontrés sur les jetées, sur les plages, dans les jardins des casinos, pendant qu’elle y attendait toute seule son père ou Valentin.

Dans sa situation, toujours mal habillée, sans compagnie, elle n’avait pas été à même de voir ce qu’il y a de meilleur dans l’esprit des étrangers.

Elle savait que Gustave n’était pas un grossier coureur d’aventures, mais elle était disposée à le trouver léger, inflammable.

Elle alla à pied de Bayswater à Chelsea le jeudi convenu, car elle ne pouvait aller souvent en voiture, la pauvre petite.

La promenade à travers le parc était agréable, malgré le froid du mois de mars, et ses joues étaient toutes roses lorsqu’elle parut dans le petit parloir.

« Comment allez-vous, cher papa ? » dit-elle en entrant dans la chambre, au moment où le jour commençait à baisser.

Mais la personne assise à la place où son père se tenait habituellement, n’était pas son père ; c’était Lenoble qui se leva pour la recevoir.

« Papa est-il plus mal ? demanda-t-elle, surprise de l’absence du capitaine.

— Au contraire, il va mieux. Il est sorti en voiture pour aller prendre l’air. C’est moi qui l’ai engagé à le faire ; il ne tardera pas à rentrer.

— Je lui ai écrit pour lui dire que je viendrais aujourd’hui ; mais je suis bien aise qu’il soit sorti, car je suis sûre que le grand air lui fera du bien. Savez-vous s’il était bien couvert, M. Lenoble ?

— Enveloppé dans des couvertures de voyage et des