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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

homme une heure marquée dans laquelle l’ange de sa vie se présente à lui. Le mien est venu le jour où je vous ai vue. J’ai parlé à votre père qui m’a de tout cœur donné son consentement. Il n’a fait que m’encourager et m’a donné à entendre que je pouvais compter sur votre adhésion. Était-il autorisé à me faire cette demi-promesse ?

— Nullement, répondit avec gravité Mlle Paget. Il n’a écouté, je suppose, que son propre désir. Vous m’avez dit plus que je n’aurais voulu entendre, monsieur Lenoble, car je ne puis accepter le trésor que vous m’offrez. Du fond de mon cœur, je vous remercie de l’amour que vous m’exprimez. Ne fût-ce que caprice passager, comme je suis porté à le croire, je ne vous remercie pas moins, car il est doux d’obtenir le choix d’un honnête homme. Je vous prie de croire que j’honore de tout mon cœur et de toute mon âme votre généreuse nature, votre sympathie pour le faible et l’opprimé ! Si vous pouvez m’accorder votre amitié, je vous prouverai toujours à quel point je l’apprécie, mais je ne puis accepter votre amour.

— Et pourquoi non ? demanda Gustave effrayé.

— Parce que je ne pourrais vous le rendre et que je ne veux pas vous donner moins.

— Mais avec le temps, Diana, avec le temps !…

— Le temps ne peut pas me montrer votre noble caractère sous un plus beau jour que je le vois en ce moment. Vous avez tout ce qu’il faut pour gagner le cœur d’une femme, mais je n’ai pas de cœur à donner. Si vous voulez être mon ami le temps ne fera qu’accroître mon affection pour vous ; mais le temps ne peut pas faire renaître ce qui est mort.

— Ce qui veut dire que votre cœur est mort, Diana ?