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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

Après cela elles arrangèrent le joli petit salon.

Elles placèrent près de la fenêtre un fauteuil pour Charlotte, et en face un autre fauteuil pour Mme Sheldon ; entre les deux fauteuils, elles disposèrent une petite table pour les livres, les fleurs, les travaux d’aiguille, et tous les petits riens si nécessaires à l’existence féminine.

Puis, pendant que Mme Sheldon faisait l’inspection des chambres pour y trouver des défauts et accumulait les critiques comme pour prouver des facultés d’invention qu’on ne lui avait pas soupçonnées jusqu’alors, Charlotte et Diana exploraient le jardin et donnaient un coup d’œil à la cour de la ferme, où la vache les regardait comme elle l’avait fait lorsque la voiture s’était arrêtée à la grille, et comme si elle n’était pas encore revenue de l’étonnement qu’avait causé à son esprit rustique cette circonstance phénoménale.

Mais Charlotte se sentit tout à coup fatiguée, puis elle fut prise d’un de ces étranges étourdissements qui étaient l’un des fréquents symptômes de son mal.

Diana l’aida à rentrer à la maison et l’établit dans un bon fauteuil.

« Il faut que je sois bien malade, dit-elle d’un ton plaintif, car la nouveauté même de cette jolie demeure ne peut me rendre heureuse longtemps. »

Sheldon arriva dans la soirée avec un approvisionnement des potions que Charlotte prenait trois fois par jour : il s’était rappelé qu’il n’y avait pas de pharmacien à Barrow, et qu’on serait obligé d’envoyer à Saint-Léonard pour se procurer les potions, et c’est pourquoi il avait pris une provision de cet inoffensif tonique.

« C’est bien de la bonté à vous d’avoir pensé à cela,