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LA TRACE

Puis se tournant du côté de la jeune fille, il lui demanda si elle savait où était la vieille.

« Non, elle est partie il y a quelque temps déjà, et n’a pas dit où elle allait. Elle n’a pas tout à fait sa raison, vous savez, monsieur, et sort souvent à la tombée de la nuit. »

Le docteur s’assit sur une chaise brisée, près du matelas sur lequel reposait le malade : une chandelle dégouttant le suif jetait une faible lueur dans cette triste et pauvre chambre ; Jabez se promenait de long en large de ce pas léger que nous avons déjà signalé. Chose étrange, car en sa qualité de philosophe la mort d’un de ses semblables ne pouvait l’impressionner beaucoup, il y avait ce soir-là dans ses manières une gêne qu’il ne pouvait entièrement cacher. Son regard allait du docteur à la jeune fille, et de la jeune fille à son frère malade. Quelquefois il discontinuait sa promenade pour regarder dehors par la porte ouverte, et une fois il s’arrêta devant la chandelle pour voir l’heure à sa montre. Il y avait dans ses yeux une expression d’anxiété, et dans sa bouche une contraction pénible ; il pouvait à peine contenir le tremblement de ses doigts effilés, qui dénotait l’impatience et l’agitation. Bientôt les horloges de Slopperton sonnèrent dix heures un quart. En entendant cette heure, Jabez attira le médecin à part et lui dit tout bas :

« N’y aurait-il aucun moyen d’éloigner cette pau-