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DU SERPENT.

quante ans, passe comparativement inaperçu. L’événement de la soirée est le nouveau ténor, le signor Mosquetti, qui a bien voulu assister au mercredi de lady Londersdon. Argyle, qui a la meilleure et la plus généreuse nature du monde, et dont la voix ample et sonore part d’un cœur aussi sain que ses poumons, se jette dans un fauteuil (qui craque un peu sous son poids, soit dit en passant) et permet à la duchesse de minauder avec lui, tandis que la rumeur circule dans l’appartement : Mosquetti va chanter. Argyle regarde négligemment, ses yeux noirs à demi fermés, avec cette expression qui semble dire : « Chante de ton mieux, mon garçon, mon gosier a des notes basses qui écraseront ta demi-octave de fausset, avant que tu puisses savoir où tu en es avec la Jolie Jeanne. Chante, mon garçon, je chanterai Scots wha hae, tout à l’heure ; j’ai en bas des amis de l’Essex qui veulent t’entendre et le vent souffle du bon côté pour porter ta voix. Ils ne pourront t’entendre à cinq portées d’ici. Chante de ton mieux. »

Au moment où le signor Mosquetti va prendre sa place au piano, un laquais annonce le comte et la comtesse de Marolles.

Valérie, belle comme toujours, avec sa pâleur et son air froid habituels, est reçue avec un grand empressement par la maîtresse de maison ; elle est l’héritière d’une des plus anciennes et des plus aristocratiques familles de France, et, en outre, la femme