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LA TRACE

cet enjeu, et que pendant huit ans je l’ai possédé et en ai joui. J’ai été l’époux d’une des femmes les plus belles et les plus riches de France. J’ai été millionnaire et un des plus opulents banquiers régnants dans l’opulent midi. Je suis sorti du dépôt de mendicité de cette ville ; je n’ai jamais eu dans ma vie un ami pour venir à mon aide ou un parent pour me conseiller. À l’homme, je ne dois rien. À Dieu, je ne dois que ceci, une volonté aussi inébranlable que les étoiles qu’il a créées, et qui ont poursuivi leurs révolutions à travers tous les temps. Sans amour, sans appui, sans protecteur, sans abri, sans mère, sans père, sans frère, sans sœur, sans ami, je me suis tracé ma propre route et l’ai suivie, défiant la terre sur laquelle j’ai vécu, et le ciel au-dessus de ma tête. Cette route a abouti à une fin qui m’a conduit ici. Qu’il en soit ainsi ! Il faut supposer, après tout, que le ciel est le plus fort. Gentlemen, je suis prêt. »

Il salua et suivit les agents de police qui le conduisirent du banc des accusés à une voiture de louage qui l’attendait à l’entrée du palais. La foule des auditeurs se rassembla autour de lui avec des figures effrayées et des yeux ardents.

La dernière fois que Slopperton vit le comte de Marolles, ce fut avec un visage pâle et beau, un sourire sardonique, et sa main blanche et délicate reposant sur la portière de la voiture de louage.