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LA TRACE

trine, et que ses lèvres refusent d’articuler les mots qui tremblent sur elles ? Est-ce parce qu’il se souvient du dernier jour où il mit pied à terre sur cette galerie, quand il portait des menottes à ses poignets et marchait entre deux hommes, et que la foule s’éloignait de lui et le montrait du doigt comme un scélérat et un assassin ? Un nuage couvre ses yeux noirs tandis qu’il regarde ces visages amis et empressés autour de lui, et il est bien aise de rabattre son chapeau sur son front, et de gagner rapidement à travers la foule la voiture qui l’attend dans la cour de la station. Il a sa mère à un bras et la jeune femme à l’autre ; son vieil ami Gus Darley est aussi avec lui, et tous les quatre ils montent dans la voiture.

Alors les vivat et les hourras d’éclater frénétiquement dans une rauque explosion. Trois vivat pour Richard, pour sa mère, pour son fidèle ami Gus Darley, qui l’aida à échapper de l’asile des fous ; pour la jeune dame… Mais, qui est la jeune dame ? Tout le monde est si désireux de savoir qui est la jeune dame, que Richard la présente aux docteurs ; aussitôt la foule se presse autour d’eux, et, mettant de côté toute cérémonie, écoute ouvertement et sans se gêner. Juste ciel ! la jeune dame est sa femme, la sœur de son ami, M. Darley, « qui n’a pas craint de croire en moi, » lui entend dire la foule, « quand le monde était contre moi, et qui, dans l’in-