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LA TRACE

air sévère et fixe dans les yeux la charmante demoiselle, ce qui sembla produire un effet instantané et très-calmant sur ses nerfs.

Comme tous les aliénés, autorisés à se divertir entre eux pendant une heure dans les jardins de l’établissement, étaient considérés, après tout, comme assez peu dangereux, les gardiens n’étaient pas dans l’habitude de faire grande attention à eux. Ces fonctionnaires se rassemblaient en un petit groupe près du portique de l’asile, fumant leurs pipes et parlant politique, ne se préoccupant nullement des malheureuses créatures sur lesquelles ils devaient veiller. Mais la reine Victoria ou l’empereur Néron, lady Jane Grey ou lord John Russell se permettaient-ils un écart sur leurs dadas respectifs, ou se laissaient-ils aller à quelque escapade trop dangereuse et trop inconvenante, et aussitôt une robuste main s’appesantissait sur l’épaule du délinquant, avec l’ordre de rentrer dans l’intérieur, ordre qui était très-rarement méprisé.

Richard ayant eu cette après-midi la permission de se mêler aux prisonniers ses compagnons pour la première fois, le petit garçon de Slopperton avait reçu l’ordre d’avoir l’œil sur lui ; et l’enfant tenait sur lui un œil très-sévère, ne laissant jamais échapper pendant une seule minute un regard, un mot ou une action du prisonnier.

Les gardiens, cette après-midi, étaient réunis