Aller au contenu

Page:Braddon - Le Secret de lady Audley t2.djvu/131

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
123
DE LADY AUDLEY

d’une voix claire et faible, je ne recommencerai pas… je ne veux pas recommencer. Si ce duel entre nous est un duel à mort, ma main ne lâchera pas l’arme qu’elle tient. »

Elle marcha vers l’arche d’un pas ferme et rapide. En passant sous cette construction massive, il lui sembla qu’elle disparaissait dans quelque gouffre sombre, béant pour la recevoir. L’horloge qui surmontait l’arche sonna minuit, et chaque coup fit vibrer la maçonnerie solide, pendant que lady Audley arrivait de l’autre côté et rejoignait Phœbé Marks qui l’attendait.

« Il y a trois milles d’ici à Mount Stanning, n’est-ce pas, Phœbé ? lui dit-elle.

— Oui, milady.

— Alors, nous pouvons les faire dans une heure. »

Lady Audley ne s’était pas arrêtée en parlant ; elle marchait très-vite le long de l’avenue, et Phœbé suivait à ses côtés. Quoique faible et délicate en apparence, elle était très-bonne marcheuse. Elle avait pris l’habitude des longues promenades chez M. Dawson, alors qu’elle n’avait qu’à obéir, et une distance de trois milles ne l’effrayait pas.

« Votre aimable mari vous aura sans doute attendue, Phœbé, dit-elle en traversant un champ qui, d’habitude, servait de traverse entre le château et la grande route.

— Oh ! c’est bien sûr, milady ; je pense qu’il se sera mis à boire avec l’homme.

— Quel homme ?

— L’homme qui accompagnait l’huissier, milady.

— Oh ! c’est probable, » dit milady Audley avec indifférence.

Il était étrange que les chagrins domestiques de Phœbé fussent si loin de sa pensée au moment même où elle tentait une démarche si extraordinaire pour