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Page:Braddon - Le Secret de lady Audley t2.djvu/132

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LE SECRET

aller arranger les affaires de la soubrette à l’auberge du Château.

Les deux femmes traversèrent le champ et gagnèrent la grande route. Le chemin qui menait à Mount Stanning était montueux et d’un aspect fort triste à cette heure avancée de la nuit ; mais milady marchait avec le courage du désespoir. Elle ne dit pas un mot à sa compagne jusqu’au moment où elles arrivèrent au sommet de la colline et aperçurent quelques lueurs annonçant le village. L’une de ces lueurs, plus brillante que les autres, indiquait la maison où probablement Luke, à moitié ivre, attendait l’arrivée de sa femme.

« Phœbé, il n’est pas couché, votre mari, dit milady, et comme je ne vois pas d’autre lumière, je suppose que M. Robert Audley dort depuis longtemps.

— Je le crois, milady.

— Êtes-vous sûre qu’il ait passé la nuit à votre auberge.

— Certainement, avant de partir, j’ai aidé la servante à préparer sa chambre. »

Le vent, déjà très-violent dans la plaine, l’était plus encore au sommet de la colline où était située l’auberge. La frêle maison était ébranlée de fond en comble par ses efforts redoublés, car il pénétrait partout par les fentes des portes, celles des fenêtres, les tuiles disjointes, et les cheminées délabrées.

Luke Marks ne s’était pas donné la peine d’assujettir la porte de sa maison avant de se mettre à boire avec l’homme qui était chargé provisoirement de garder ses meubles et ses ustensiles de ménage. Le maître de l’auberge du Château était une brute paresseuse et sensuelle qui ne songeait qu’à ses plaisirs et haïssait quiconque l’empêchait de s’y abandonner librement.

Phœbé ouvrit la porte elle-même, et entra suivie de milady. Le gaz était allumé au comptoir et enfumait