Page:Braddon - Le Secret de lady Audley t2.djvu/15

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
7
DE LADY AUDLEY

Le domestique qui ouvrit la porte au visiteur inattendu manifesta sa joie en reconnaissant le neveu de son maître.

« Sir Michaël sera bien content de vous voir, monsieur, dit-il en introduisant Robert Audley dans la bibliothèque où flambait un bon feu, et qui semblait désolée, le fauteuil du baronnet restant vide sur le large tapis du foyer. Vous apporterai-je quelque chose à dîner ici, monsieur, avant que vous montiez à l’appartement ? demanda le domestique. Milady et miss Audley dînent de bonne heure depuis la maladie de mon maître, mais je puis vous servir tout ce qui pourra vous faire plaisir, ajouta-t-il avec empressement.

— Je ne prendrai rien avant d’avoir vu mon oncle, répondit Robert précipitamment, c’est-à-dire si je puis le voir de suite. Il n’est pas assez malade pour ne pas me recevoir, je suppose ? ajouta-t-il d’un air inquiet.

— Oh ! non, monsieur… pas trop malade, un peu accablé seulement, monsieur. Par ici, s’il vous plaît. »

Il fit monter à Robert le court escalier en chêne conduisant à la chambre octogone dans laquelle George Talboys était resté si longtemps, cinq mois auparavant, à regarder d’un œil préoccupé le portrait de milady. Le tableau était terminé maintenant et était suspendu à la place d’honneur en face de la croisée, au milieu des Claudes, des Poussins et des Wouvermans, dont les teintes moins brillantes étaient écrasées par le vif coloris de l’artiste moderne. La lumineuse figure semblait ressortir au milieu de ce fouillis de cheveux dorés, délectation des préraphaélites, avec un sourire moqueur, au moment où Robert s’arrêta un instant pour jeter un coup d’œil sur le portrait bien présent à son souvenir. Deux ou trois minutes après, il avait traversé le boudoir de milady et son cabinet de toilette, et s’arrêtait sur le seuil de la