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Page:Braddon - Le Secret de lady Audley t2.djvu/82

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LE SECRET

enchaîner la fortune vous sauveront du châtiment ? Non, milady, votre jeunesse, votre beauté, votre grâce et votre élégance ne rendront que plus horrible le secret de votre vie. Je vous déclare qu’il ne me manque plus qu’une preuve pour vous faire condamner, et cette preuve je l’aurai. Helen Talboys n’est jamais retournée chez son père. Quand elle abandonna son pauvre vieux père, elle annonça clairement son intention de fuir à tout jamais les ennuis du passé. Que font généralement les gens qui veulent recommencer la vie sur un autre pied, — en se débarrassant des entraves qui les gênaient dans leur première carrière ? Ils changent de nom, lady Audley. Helen Talboys quitta son fils tout enfant ; — elle s’enfuit de Wildernsea avec l’intention bien arrêtée de détruire son identité. Elle disparut comme Helen Talboys, le 16 août 1854, et le 17 du même mois elle reparut sous le nom de Lucy Graham, la jeune fille sans amis qui consentit à travailler presque pour rien, à condition qu’on ne la questionnerait pas.

— Vous êtes fou, monsieur Audley, s’écria milady, vous êtes fou, et mon mari me protégera contre votre insolence. Cela prouve-t-il quelque chose que je sois entrée dans une pension le lendemain du jour où Helen Talboys avait abandonné sa famille ?

— Le fait en lui-même ne prouve pas grand’chose ; mais quand on le rattache à d’autres preuves…

— Quelles autres preuves ?

— Celles de deux adresses collées l’une sur l’autre sur un carton laissé par vous chez mistress Vincent. La première portait le nom de miss Graham, et celle de dessous celui de mistress George Talboys. »

Milady se taisait. Robert ne pouvait voir sa figure dans l’obscurité, mais il distinguait très-bien ses deux petites mains appuyées avec force sur son cœur et il comprit que le trait avait porté.