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Page:Braddon - Les Oiseaux de proie, 1874, tome II.djvu/114

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LES OISEAUX DE PROIE

et de ses habitants. Était-ce pour l’amour de Charlotte que je m’enflammais ainsi ?

« Je me trouvai tout de suite à l’aise avec mon hôtesse. Le patois même me devint plus intelligible, lorsque j’en eus fait cette première expérience. J’appris que je pourrais avoir une chambre propre et bien close, avec la nourriture et le service, à un prix qui me parut fabuleusement raisonnable, même en tenant compte de mes faibles moyens. Ma cordiale hôtesse me servit un repas princier : du jambon grillé et des œufs pochés, tels que je n’en avais jamais vu qu’en peinture ; des gâteaux bruns, croquants, sortant d’un miraculeux four dont j’avais entrevu la bouche par la porte qui conduisait dans l’intérieur flamand ; d’excellent thé et de la crème, de la crème parfaite.

« Après avoir joui de ce banquet, je me mis à la fenêtre pour voir le tranquille paysage à la lueur des étoiles.

« Il était situé au haut d’une colline, la colline la plus élevée du pays, et pour certains esprits, cela seul est un charme. Il semble que l’on aspire un breuvage éthéré en respirant l’air frais de la nuit. Je n’avais pas éprouvé de sensation plus délicieuse depuis le temps où j’avais visité les créneaux moussus du château d’Arques, alors que j’avais vu comme un tapis se déroulant à mes pieds les vergers, les jardins de la verdoyante Normandie.

« Mais cette colline était encore plus élevée que celle sur laquelle se dressent les tours croulantes du vieux château féodal et le paysage était infiniment plus sauvage que celui d’Arques.

« Aucun mot ne pourrait rendre la joie que j’éprouvais dans cette contrée déserte à me sentir éloigné du