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Page:Braddon - Les Oiseaux de proie, 1874, tome II.djvu/197

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LES OISEAUX DE PROIE

— Je ne suis pas tenue de consulter les désirs de mon beau-père. J’ai seulement besoin que cela vous convienne, maman.

— Mais, ma chère, il n’est pas possible que je consente à une chose que M. Sheldon désapprouverait.

— Oh ! maman, chère maman, je vous en supplie, ayez une fois une opinion à vous. Je reconnais que M. Sheldon est le meilleur juge qui se puisse trouver pour les affaires d’intérêt, mais ne le laissez pas me choisir un mari. Donnez-moi votre autorisation, maman, et je ne me soucie d’aucune autre. Je ne veux pas me marier contre votre volonté ; d’ailleurs, je suis sûre que vous aimez M. Haukehurst. »

Mme Sheldon secoua la tête d’un air désespéré.

« Recevoir chez soi un aimable garçon, c’est pour le mieux ; mais les choses vont moins bien quand votre fille unique vous dit qu’elle s’est mis en tête de le prendre pour mari. Je ne comprends rien à votre folie, Charlotte ; il y a à peine quelques mois que vous avez quitté la pension, et je m’imaginais que vous resteriez plusieurs années avant de penser à vous établir. »

Mlle Halliday fît une mine très-longue.

« Chère maman, je ne songe pas à m’établir ! Ce sont les femmes de chambre qui parlent ainsi, je crois, quand elles quittent le service pour épouser un garçon boucher ou un autre garçon. Valentin et moi nous ne sommes pas si pressés. Tout ce que je désire, c’est être franche avec vous. J’ai horreur des mystères. C’est pour cela, maman, que je trouve que c’est mon devoir de vous dire qu’il m’aime, et pour moi… je l’aime aussi… très-tendrement. »

Elle prononça ces derniers mots avec une timidité extrême.