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Page:Braddon - Les Oiseaux de proie, 1874, tome II.djvu/250

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LES OISEAUX DE PROIE

cette jeune personne, la main dans la main avec Philippe Sheldon, je pense qu’il est temps que je me retire. Vous n’avez pas besoin de moi et un peu plus tôt, un peu plus tard, je sens que je pourrais me trouver en travers de votre chemin. »

Le capitaine dit cela d’un ton tout à fait touchant ; si bien que le cœur de Valentin eut comme un remords en se rappelant à quel point il avait désiré se débarrasser de ce Vieux de la Montagne… et voilà que le pauvre homme offrait lui-même de se retirer.

Valentin étendit la main pour saisir celle de son vieux camarade et patron.

« J’espère que vous réussirez quelque… quelque bonne affaire, » dit-il chaleureusement.

L’adjectif « bonne » avait été par lui rapidement substitué à l’adjectif « honnête » qui avait effleuré ses lèvres. Il était à ce moment trop bien disposé envers le monde entier pour ne pas s’apitoyer sincèrement sur le sort de ce vieillard aux cheveux blancs, qui s’était si longtemps nourri du pain des coquins.

« Allons ! s’écria-t-il joyeusement, je me charge de tout emballer, capitaine, et nous irons ensuite faire ensemble notre dernier dîner, boire une dernière bouteille de champagne, à mes frais, où vous voudrez.

— Dînons chez Blanchard, répliqua Horatio, il y a chez lui une encoignure de fenêtre que j’aime beaucoup ; on voit de là les badauds de Regent Street, c’est amusant, cela me rappelle un peu la Maison d’Or. Nous boirons à la santé de Charlotte, Valentin, dans de grands verres. C’est une charmante personne ; je voudrais seulement, par affection pour vous, que ce fût une héritière. »

Les yeux des deux hommes se rencontrèrent au mo-