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Page:Braddon - Les Oiseaux de proie, 1874, tome II.djvu/72

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LES OISEAUX DE PROIE

à lui-même. Bah ! je suis sûr qu’elle m’a déjà oublié. Quinze jours sont un siècle pour certaines femmes, et je croirais assez que Charlotte est une de celles-là. Elle est très-impressionnable et doit oublier vite. Je suis curieux de m’assurer si elle ressemble réellement à cette Molly, dont la miniature a été trouvée par Mme Haygarth dans le bureau en bois de rose, ou si cette ressemblance n’a été qu’un effet de mon imagination. »

Haukehurst fit à pied le chemin de Chelsea à Gray’s Inn. Il était près de midi lorsqu’il se présenta chez George qu’il trouva assis devant son bureau. L’immense feuille généalogique des Haygarth était ouverte devant lui : il semblait profondément absorbé par l’étude d’un volume de notes. Il leva les yeux sur Valentin au moment où celui-ci entrait, mais sans cesser de mâcher le bout de son crayon, tout en faisant un signe d’accueil au voyageur. On a déjà vu que ni l’un ni l’autre des Sheldon n’avait le caractère démonstratif.

Après cet accueil familier, l’avocat continua pendant quelques minutes d’examiner ses notes, tandis que Valentin, assis dans un vieux fauteuil de cuir, se chauffait.

« Eh bien ! jeune gentleman ! s’exclama Sheldon au moment où il fermait avec bruit son livre d’un air de triomphe. Je pense que vous voilà en bonne voie et vous devez bénir la bonne étoile qui vous a mis sur ma route.

— Ma bonne étoile n’a pas fait beaucoup pour moi jusqu’à présent, répondit froidement Haukehurst. Si je suis en bon chemin, je présume que c’est parce que vous êtes dans un meilleur, mon cher George ; il est donc inutile de prendre avec moi des airs si protecteurs… Comment donc êtes-vous parvenu à vous procurer le certificat de mariage de la jeune Molly ? »