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les mémoires d’un soldat inconnu

chées ; les combattants, dans une accalmie de combat ; les prisonniers, dans les camps de détention, sont en butte à cette idée fixe qui se traduit si souvent par ces mouvements qui prennent le corps d’assaut. Et quand la relève éloigne des lieux de tuerie, on cherche l’oubli de l’étreinte des tranchées dans d’autres étreintes. La guerre saigne une génération par tous les moyens.

Non, je ne puis retourner dans mon pays où la masse de la population reste honnête. On se détournerait de moi, on empêcherait de m’approcher, et on aurait raison.

Le gouffre qui me tient est grouillant de vices de toutes les races de l’univers réunies. L’esprit le plus sain devient pervers. Mon âme a sombré. Mais que peut faire la déchéance de l’âme ? Il y a de l’argent à organiser et à faire durer la guerre.

Dans mon pays sain, on éviterait ma présence, et encore on aurait raison. Si le vice a des formes de laideurs visibles,