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les mémoires d’un soldat inconnu

vient, s’infiltre dans la moindre fissure des masques, et tue pesamment, horriblement, c’est un écrou qui enserre la poitrine devenue un brasier. Et les vagues montent et se mesurent, s’étreignent en une marée d’hypérite qu’alimentent sans cesse les obus qui éclatent sourdement.

Les hasards du combat nous ont conduits dans un entonnoir.

Au-dessus, c’est un rugissement de furies. Le ciel est bas, lourd d’orage. Et les éléments se déchaînent et se joignent aux inventions meurtrières des hommes. La foudre répond aux canons. Les éclairs hachent les nues pendant que l’artillerie hache la terre.

Les lèvres serrées au tampon de mon masque, j’aspire l’air filtré et qui me revient dans la bouche avec un goût fade de poumon. L’air est parcimonieusement mesuré, les tempes me battent, le cerveau me bourdonne sous l’afflux du sang. Je ne perds pas de vue mon compagnon qui s’agite. À un mo-