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adolphe brassard

Des jours, une éternité, et, soudain, dans le lointain c’est l’appel du clairon qui éclate, s’en vient, s’enfle, élargit la campagne, l’espace, le ciel, disperse les nuages, couche les arbres, et, dans un élan frémissant de rires et de pleurs, nous soulève hors des parapets, vide les tranchées. L’armistice est signé !

Cette fois, la nouvelle est véridique. La guerre est finie :

— Déposez armes !

Un vent d’allégresse nous jette dans les bras des uns des autres. On crie, on pleure, on hurle sa joie. Les baïonnettes se crochissent, on brise les fusils ; on arrache son casque, sa tunique, sa chemise, et, à travers les torses nus, on perçoit les cœurs qui palpitent de délivrance. Le manteau de plomb qui pesait sur la terre se fond en gouttelettes de rosée, et un long soupir de guérison gonfle son sein douloureux. Le vent est consolant, la lumière nous baigne d’effluves vivifiants et plaisants. Un immense sanctuaire s’appuie sur la terre et sou-