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Étienne se mit à marcher lentement, absorbé ; il repassait dans sa mémoire son dernier entretien avec Joachim Bruteau, il revoyait les yeux de braise fixés sur lui, il entendait encore la voix mordante lui annonçant ses malheurs.

— Pourquoi n’es-tu pas venu me voir avant de retourner dans le Nord, reprocha doucement tante Marie, je t’ai si attendu !

— Ne me le demandez pas, j’étais fou, une seule idée me hantait : fuir ! fuir les lieux où j’avais connu mon court bonheur si brusquement détruit. Tout ici me parlait trop de la bien-aimée disparue, j’avais une hâte morbide de retourner dans mon pays de glace, de retrouver là-bas le cadre que je lui avais fait, et où je savais qu’elle m’attendait.

— Pauvres enfants !…

Un silence tomba, plein de souvenirs pénibles.

— Ma tante, que vous disait Joachim Bruteau dans sa lettre où il exprimait le désir de me voir ?

— J’ai ici cette lettre, je vais te la montrer.

Étant allée la chercher, elle la donna à son neveu.

— Lis toi-même.

Étienne lut :

« Madame : Vous serait-il possible de communiquer avec votre neveu, Étienne Bordier. Je désirerais m’entretenir avec lui, sans faute. C’est urgent. Joachim Bruteau »

— Il désire me voir, soit, moi aussi, plus que jamais. Demain, je saurai ce qu’il me veut.

— Et demain soir, tu seras de retour ?