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LA VIE DE FAMILLE

d’une nombreuse famille. Chaque famille a sa maison particulière avec jardin, et la plupart des individus sont ouvriers et cultivateurs. Ici nous fûmes reçus également avec des chants de bienvenue, des fleurs, et je remarquai chez cette jeunesse beaucoup de vie. Rien n’était agréable comme de voir ces groupes animés et joyeux circuler parmi ces jolies petites habitations. L’église de la société (qui est en même temps maison d’école) ne me parut pas en harmonie avec sa destination. L’élément poétique était un peu plus vivace ici que dans le Phalanstère de New-Jersey ; l’élément moral y sert aussi de noyau, la poésie n’est qu’un accessoire. Nous dînâmes dans un joli ménage où les hôtes ne furent pas questionnés, on se contenta de les régaler et de les traiter amicalement. Un nègre et sa femme entrèrent et demandèrent à faire partie des membres de la communauté. Je me trouverais mieux à Hopedale que dans le « Phalanstère de l’Amérique du Nord, » parce que ses habitations sont séparées, parce que la confession de foi y est chrétienne, et que le patriarche paraît être un homme digne de confiance. Cette petite société subsiste depuis environ sept ans, et se compose de trente et quelques familles, de célibataires : cent soixante-dix âmes en tout. Chacun fait profession d’être chrétien « non résistant et tempérant. » Adin Balou a publié sur la raison vraie des écrits dont il m’a fait présent.

En général, dans les foyers et sociétés que j’ai visités jusqu’ici, la vie m’a paru peu gaie, assez dépourvue de jouissances intellectuelles et du sentiment du beau, mais intimement estimable, pieuse, grave, laborieuse ; c’est, somme toute, un bon fonds pour une forte vie nationale. De ces petits foyers sortiront nécessairement des hommes et des femmes graves, des individus qui prendront la vie